Ceux qui parlent de Linux sont capables de dire tout et son contraire. Alors j’apporte moi aussi ma contribution, car ceux qui ne se sont pas intéressé aux évolutions de Linux sont capables de dire n’importe quoi, en particulier s’ils sont friands de Mac OS ou, pire, de Windows.
Si on revient une vingtaine d’années en arrière, Linux, c’était un truc un peu rustre, complexe, réservé aux développeurs ou en tout cas à ceux qui savaient programmer. On entend encore dire que pour utiliser Linux, il faut entrer des lignes de code. C’est vrai, mais c’est également faux.
Alors plongeons tranquillement dans l’univers de Linux. Ca va être un peu long alors installez-vous confortablement sur vos toilettes.
Vous utilisez déjà Linux
Linux est ce que l’on appelle un « noyau » (« kernel » en anglais). Il s’agit d’une partie de l’informatique qui sert d’interface entre le matériel et les logiciels. Son importance est cruciale puisque c’est basiquement ce qui différencie l’ordinateur de la machine à écrire.
Créé en 1991 par un étudiant finlandais du nom de Linus Torvalds afin de bénéficier d’un environnement de travail qui soit disponible et gratuit (les licences logicielles étaient extrêmement chères à l’époque et il fallait partager leur utilisation entre tous les étudiants), il s’est répandu dans le petit monde du logiciel libre dont il est devenu l’un des piliers. Wikipédia vous racontera ça mieux que moi.
Depuis, ce noyau est utilisé dans les systèmes d’exploitation de la famille GNU/Linux (GNU étant l’ensemble des logiciels permettant de faire fonctionner le noyau Linux – on doit leur création à Richard Stallman et la Free Software Foundation) ainsi que dans Google Android et ChromeOS qui sont là juste pour nous rappeler qu’à partir d’un truc bien, on peut créer un monstre capable d’asservir l’humanité.
Les systèmes GNU/Linux sont utilisés sur la plupart des serveurs informatiques que vous utilisez au quotidien, à commencer par ceux qui font tourner Internet. Ce site est d’ailleurs hébergé sur un serveur GNU/Linux.
Les systèmes d’exploitation basés sur Linux ont la réputation d’être fiables et sécurisés, ce qui n’est pas le cas de Windows. Et le fait qu’ils soient distribués sous licence libre (GPL) permet à tout un chacun d’en prendre possession sans payer de redevance à une autre entreprise (tous sauf Android et Chrome OS).
GNU/Linux en quelques mots
GNU/Linux est une famille de systèmes d’exploitation. Leur nombre est égal à la somme des choses que l’on a envie de faire avec un ordinateur. C’est ce qui rend cet univers à la fois fascinant et effrayant.
Heureusement, parmi tous ces systèmes d’exploitation, il existe quelques « distributions » qui sortent du lot.
Une distribution GNU/Linux, c’est un système adapté à un type de tâche particulier. On trouve, sans être exhaustif, des distributions particulièrement adaptées pour :
- Aller sur internet
- Utiliser des logiciels de bureautique
- Utiliser des logiciels de conception multimédia
- Coder sans s’encombrer d’une interface graphique
- Faire tourner Internet
- Héberger des services en ligne
- Utiliser un pack de logiciels bien spécifiques pour une utilisation bien précise
- Faire tourner des jeux vidéo
Mais le mieux dans l’histoire, c’est que quasiment toutes les distributions font tout cela. Juste que certaines font certaines tâches mieux que d’autres car elles sont spécialement prévues pour.
Chaque distribution vient avec son paquet de logiciels. Certains logiciels tournent sur toutes les « distros » et passent par des solutions de diffusion universelles, d’autres sont vraiment très spécifiques et ne peuvent fonctionner que dans leur environnement naturel.
Parmi les distributions les plus populaires, vous avez sûrement entendu parler de :
- Debian
- Ubuntu
- Fedora
- Arch Linux
- Linux Mint
- Zorin OS
- Manjaro
- FreeBSB
- EndlessOS
- Gentoo
- OpenSUSE
- Tails
- et toutes les autres…
On ne s’y retrouve pas forcément, d’autant que ça peut se complexifier : en fouinant un peu, on comprend que Linux Mint, par exemple, est basé sur Ubuntu, lui-même basé sur Debian… C’est lequel le mieux alors ?
Choisir son GNU/Linux
Deux choses à prendre en compte pour choisir votre distro :
- Votre niveau en informatique (compétence et autonomie)
- Vos besoins
Selon votre niveau de compétence et d’autonomie, vous serez dirigé vers certaines distributions plus ou moins complexes et plus ou moins communautaires.
Vous pouvez être une bille en informatique mais être capable et désireux d’apprendre. Alors peut-être irez-vous vers une distribution maintenue par une plus grande communauté qui pourra vous aider, vous conseiller, vous former. Si vous n’êtes pas spécialement autonome et avez besoin de réactivité, vous préférerez une distribution munie d’un support technique professionnel (ce support sera payant).
Quant à vos besoins, il suffit dans un second temps de vous demander à quoi vous sert votre ordinateur et la distribution idéale vous sautera presque aux yeux. Il ne restera plus qu’à choisir l’interface (le « bureau » que l’on appelle « saveur » dans le joyeux monde de GNU/Linux), sachant qu’elles ont toutes de quoi vous faire rêver.
Pourquoi utiliser GNU/Linux ?
Le fait que GNU/Linux soit « gratuit » ne doit pas être l’unique argument. Il est de plus erroné, puisque GNU/Linux, comme tous les logiciels libres, n’est pas gratuit : il est proposé à partir de 0€.
Et c’est peut-être ça l’argument principal : le monde du logiciel libre, c’est une philosophie. On part du principe que le logiciel que l’on utilise est déjà payé et qu’il est placé dans le pot commun de l’humanité. S’il vous convient alors c’est parfait. Si vous pensez qu’il pourrait s’améliorer, alors vous participez : soit en donnant du temps (rapports de plantages, remarques, traduction, codage…), soit en donnant de l’argent (abonnement, mécénat ou commande précise).
Question sécurité, on fait difficilement mieux. Le fonctionnement même de Linux (que l’on retrouve également dans Android de Google) fait qu’il est très difficile d’installer un malware à l’insu de l’utilisateur. En effet, chaque fois qu’un programme voudra effectuer une modification, il vous demandera l’autorisation. Y compris pour faire une mise à jour. De plus, les systèmes basés sur Linux sont divisés en plusieurs zones qui communiquent difficilement entre elles : d’un côté il y a autant de zones que d’utilisateurs, chacune contenant les fichiers et données d’utilisation de chaque utilisateur ; de l’autre, il y a le cœur du système qui est quasiment intouchable. Vous pouvez perdre vos données, mais pas celles des autres utilisateurs. Et la partie protégée restera intacte. Sauf si vous avez sciemment fait n’importe quoi avec des droits d’administrateur.
Côté virus, il y en a très peu. C’est tellement plus facile et intéressant de s’attaquer à Windows que les pirates informatiques évitent assez royalement Linux. Attention, des portes dérobées existent malgré tout et même des erreurs de codage peuvent survenir. Mais c’est justement tout l’intérêt de la communauté : aussitôt repéré, aussitôt éliminé. Pensez à toujours supprimer les logiciels inutiles et à faire toutes les mises à jour pour limiter votre surface d’attaque !
Parmi les autres bonnes raisons d’utiliser GNU/Linux, on trouve la question des performances. Les distributions n’étant pas engagées dans une course à la puissance, certaines ont la capacité (ou la volonté) de faire fonctionner des ordinateurs anciens, ce qui évite la mise au rébus de plusieurs milliers d’appareils chaque année. Gardez ou donnez, dans tous les cas c’est vertueux.
La vie privée est aussi au centre des attentions. GNU/Linux ne vous espionne pas et promeut des logiciels libres, éthiques et garantis sans traceurs publicitaires. Ça change la donne !
Chaque logiciel étant libre, il est possible (et même conseillé) de s’en servir de base pour en créer de nouveaux. C’est ainsi que l’on voit fleurir une myriade de petits logiciels pas toujours très ambitieux qui ont juste le mérite de se concentrer sur une tâche et de la faire bien. Des genres de logiciels que l’on ne trouve pas dans le monde privateur.
La personnalisation est aussi l’un des points forts de GNU/Linux, puisque chaque distribution embarque des « saveurs » qui donnent un aspect différent à votre système d’exploitation. Certaines ressemblent à Windows, d’autres à MacOS, d’autres à Android. D’autres sont pensées dans une optique totalement autre et proposent une expérience renouvelée qui peut changer fondamentalement votre conception même de l’informatique. Rien que ça !
Autre argument en faveur de ces saveurs : contrairement aux interfaces des logiciels propriétaires, elles ne changent pas tous les quatre matins. Si vous en trouvez une qui vous convient, vous pourrez la garder pendant un long moment. Et si vous estimez que la version 17 s’éloigne du concept initial, vous pouvez rameuter d’autres personnes insatisfaites et effectuer un « fork » de la version 16 qui débouchera sur une nouvelle saveur à mettre au pot commun.
Côté publicité, là où Windows va vous afficher de la pub pour les produits Microsoft (365, One drive, X-Box, Teams, Skype, Candy Crush…) et tous les produits de ses milliers de partenaires avec qui il partage vos données d’utilisation, Linux, lui, n’a rien à vous vendre et ne vend pas vos données. Vous verrez peut-être un lien ou une option pour accéder au support technique payant ou pour acheter une licence qui fait office de soutien financier aux développeurs. Mais c’est tout. Ne pas payer ne vous empêchera pas de profiter pleinement de l’ordinateur que vous avez acheté avec le fruit de votre labeur. Sinon changez de distribution.
Dernier point d’importance, il est possible de faire tourner des logiciels Windows ou Mac sous GNU/Linux. Bon, ce n’est pas possible pour tous, et il faut que votre ordinateur tienne la route. Mais des programmes permettent d’émuler l’environnement Windows et d’installer et exécuter des logiciels (ou des jeux) que l’on ne trouve pas ailleurs. Renseignez-vous car c’est simple comme bonjour. Wine est une bonne base pour faire tourner les logiciels et jeux Windows, vérifiez si les vôtres sont référencés. Sinon cherchez des alternatives.
Quels sont les problèmes ?
Soyons honnêtes, tout n’est pas parfait et si vous souhaitez franchir le pas, il vaudra mieux s’entourer : participez à une Install Party près de chez vous, rejoignez un forum sur internet, contactez un informaticien à domicile (j’en connais un si vous voulez ;)).
Le plus gros problème pour qui découvre ce monde, c’est que c’est un joyeux bazar (aux dires mêmes des développeurs). Il y a tellement de distributions, de versions, de dérivés, de logiciels plus ou moins officiels, plus ou moins à jour, plus ou moins maintenus qu’on pourrait trembler d’effroi.
L’autre problème c’est qu’il existe des puristes du GNU/Linux originel qui ne sont pas franchement avenants. Si vous êtes un « transfuge » de Windows ou MacOS, vous pouvez vous heurter à une forme de dédain de la part d’utilisateurs élitistes blasés. Pas de panique, il y en a aussi qui auront à cœur de vous accompagner ! Il suffit de les trouver (ne vous trompez pas de forum ^^)
Attention tout de même avec les conseils que vous pourriez trouver ici et là : GNU/Linux vous offre un accès total à votre ordinateur. Et si vous ne serez pas embêté par des virus, vous pourriez être vous-même le pire ennemi de votre ordinateur. En entrant une commande un peu farfelue, vous pouvez littéralement faire fumer votre processeur ou votre carte graphique. N’utilisez le terminal et la commande sudo que si vous êtes absolument sûr de vous ! Et par extension, ne donnez pas vos mots de passe de super utilisateur à n’importe qui.
Un autre souci, c’est que si vous avez un ordinateur bas de gamme, il peut être difficile de trouver une distribution qui fonctionne parfaitement. Je parle ici d’un ordinateur acheté à bas prix dans un magasin discount ou reçu en cadeau avec un abonnement ou je ne sais quoi. Les pilotes et logiciels GNU/Linux sont créés par des communautés et, bien souvent, par des bénévoles. Ils le font avant tout pour du matériel qui tient la route.
Comment tester Linux ?
La solution la plus simple si vous n’avez pas un copain pour vous montrer comment ça marche, c’est de vous rendre sur le site officiel d’une distribution et de la télécharger. Ça pèse entre 600 Mo et 3Go. Ensuite, vous pourrez créer une clé USB bootable qui vous permettra de tester votre Linux sur votre ordinateur : démarrez votre ordinateur, accédez au BIOS ou à l’UEFI avant le démarrage de Windows ou Mac OS puis demandez à booter sur votre clé USB.
Tester Linux n’affectera pas votre ordinateur, n’effacera pas vos fichiers. Et tout ce que vous ferez sous Linux ne sera pas sauvegardé (à moins que vous accédiez à votre disque Windows – ce qui peut être un bon moyen de récupérer vos fichiers, ceci dit). Si cela vous tente, vous pourrez recommencer autant de fois que vous voudrez. Si cela vous plaît, vous pourrez installer GNU/Linux à côté de Windows et choisir de lancer l’un ou l’autre au démarrage. Ou bien vous pouvez carrément effacer votre Windows. De toute façon il ne sert à rien et il prend de la place. Pour info, un espace de 40Go est confortable pour installer et faire tourner une distribution dans un premier temps.
Voici quelques distributions que vous pourriez avoir envie de tester :
- Debian (la base, puissante et modulable ; hyper classe avec KDE ou GNOME ou hyper rapide avec XFCE ou LXQt ; NB: vous devez être connecté à internet avec un câble ethernet pour installer Debian sinon vous n’aurez pas d’interface graphique)
- Ubuntu (la plus célèbre, la plus compatible, la plus commerciale, mais aussi la plus critiquée ; livrée avec des possibilités de support technique pour les pros)
- Zorin OS (ressemble à Windows mais en beaucoup plus mignon et fonctionne sur ordinosaure : testé et validé sur un PC de 2008 2 cœurs 2Ghz 2Go de RAM avec Zorin 16)
- Linux Mint (récente, très en vogue mais aussi très contestée à cause d’une adaptation trop molle aux consignes de sécurité – idéale pour papy)
- PrimTux (développée et maintenue pas des enseignants français à destination des enfants de 3 à 12 ans sur ordinosaure : des couleurs, des jeux, des logiciels simples, éducatifs et hors ligne pour la plupart)
Cela devrait suffire pour un débutant. Si vous voulez juste voir à quoi cela ressemble en action, rendez-vous sur DistroSea et choisissez votre distribution préférée. A noter que DistroSea n’est pas du tout représentatif de ce que ça pourrait donner sur votre ordinateur. C’est purement cosmétique.
Si on vous recommande une autre distribution, renseignez-vous avant d’installer. Il faut savoir que les distributions dérivées de Debian sont généralement plus accessibles que celles dérivées de Arch, Suse ou Fedora.
A vous de jouer maintenant.